Aujourd'hui il fait moins chaud, le ciel est couleur craie et je m'assois sur un bidon rouillé dans ce terrain vague pas loin de mon hôtel. Comme d'habitude, machinalement, je tâte mes poches puis me souviens que je ne peux plus fumer. Plus boire non plus. Je n'ai plus tellement d'alternatives et la douleur reste cuisante. Ça ne passe pas. Je suis tout seul, avec ce paquet de feuilles dans la main – que m'a filé hier Jhonn – étonné que je croupisse toujours dans le même hôtel pisseux en bordure de Paris. Je ne comprends pas bien pourquoi Jhonn a pris ce pseudonyme étrange.
Hier j'ai emprunté des trajets sinueux, presque lunaires, dans la ville. J'avais envie de frapper aux loges des concierges. Je louchais brusquement sur les stores et les parasols, habités de bruits anormaux et sinistres, dans ces quartiers de Paris anti-hygiéniques au possible.
Je suis entré par la porte principale dans le manuscrit de Jhonn qui ressemble à s'y méprendre à une maison de santé – surtout les premières pages. Après le flux devient plus commode. J'essuie des gouttes de sueur. Combien de temps je vais rester caché ainsi. Cette solitude m'obsède. Il vaut mieux apprendre la tchatche aux enfants, plutôt que de récolter des bons points. Les bons points vous mènent dans les terrains vagues. Dans la maison de santé de Jhonn, il y a des figures rouges, impalpables, prêtes à se refermer au moindre mot. Assises contre des murs blancs. Sans assurance et grotesques. Interloquées dans leur obscurité.
En face du terrain vague, il y a un Café et un fourgon de police. Des gitans crient. Des gamins jouent au foot dans la ruelle déserte. Le médecin m'avait parlé de blessure et de hasard, et je lui avais répondu que c'était ainsi que tout se termine. Par quelques paroles aimables jugeant des effets produits. Chez certains du moins. Parce que pour d'autres, c'est les terrains vagues. Des destinations brillantes, pliées en deux.
il y a tant d'eau dans le ciel
un incendie dans l'océan
et les piscines brûlent
il y a tant d'eau dans le ciel
un incendie dans l'océan
et les piscines brûlent
La vie est un livre dont vous n'êtes pas le héros.
je suis un bateau qui prend l'eau de toute part
un logiciel brisé
un écran (défectueux)
un affectueux délaissé
un chanteur sans public
un rêveur sans ciel (sans horizons)
un voyageur assigné à résidence
un guerrier sans ennemis
un convivial sans amis
un buveur de bar sans complices
un homme d'action détraqué
une intelligence bugguée
une existence malheureuse
: Golgothism*In*Grey [oiling the Instabtor mix]
(original by g.Cl4renko)